« Quoi qu’il arrive, même si le régime social est formidable, en Ukraine on se gèlera les couilles, et en Floride il fera beau. »
Coluche
Force est d’admettre qu’introduire un article sur l’Ukraine avec une citation de Coluche n’est pas forcement ce qu’on aurait pu attendre mais cette phrase me fait marrer parce qu’elle est devenue drôle aussi par son anachronisme. Dans mon esprit, l’Ukraine c’était cet ancien satellite soviétique qui avait gagné sa liberté avant d’entamer la célèbre (mais presque oubliée) « Révolution Orange »… Non, ce n’était pas en 1991 ça, mais en 2004 ! Cette année là, les ukrainiens prenaient la rue et faisaient annuler le scrutin, amenant au pouvoir le tristement célèbre Victor Ioutchenko (souvenez vous… cet homme à la tête calcinée par un empoisonnement à la dioxine)… Ça y est ? vous y êtes ?
Alors que reste t il de ce renversement politique ? Et bien plus grand chose… le « leader orange », défait en 2010, a laissé sa place à une sorte d’autocrate fantoche, très proche de la Russie, hargneux avec les journalistes, pratiquant censure, répression et corruption de haute volée… Un président élu qui fait donc exactement ce pour quoi les ukrainiens s’étaient insurgés il y a 9 ans ! Le « régime social » dont parle Coluche était peut être donc meilleur sous l’ère soviétique et, encore une fois, je l’ai entendu à de nombreuses reprise dans la bouche des gens que j’ai rencontré.
J’arrivais donc de la Moldavie à Odessa, ville portuaire la plus importante d’Ukraine, centre d’affaires majeur du pays, lieu chargé d’histoire et capitale de la « nuit » ukrainienne ! Une ville jeune, bouillonnante et plutôt belle, ce qui est assez rare dans les grandes villes d’inspiration soviétique pour être noté !
J’y restais 4 jours, à déambuler dans ses longues avenues qui vous amènent invariablement vers le port ! immense, c’est la véritable fierté de la ville ! En Bulgarie, on se battait à Varna et Burgas, pour désigner la « capitale de la Mer Noire »… la bataille est terminée, la reine de la côte ouest, c’est elle, Odessa.
Du port, je me suis laissé aller à flâner le long des nombreuses plages qui bordent la ville pour arriver jusque dans le centre historique. Ici j’ai pu admirer les fameux escaliers du Potemkine, où fut tourné le non moins légendaire film « Le Cuirassé Potemkine » en 1925 que je vous invite à regarder si ce n’est pas déjà fait… Vous pourrez également fredonner du Jean Ferrat en descendant les marches, pour les plus « rouges » d’entre vous 🙂
Ensuite, j’avais besoin de faire des choix. Mon visa russe ouvrant le 15 juin et ne comptant pas en perdre une seule précieuse journée, il fallait un « plan de bataille » pour traverser ce pays, deuxième plus grand de l’Europe continentale après la Russie. J’ai donc fait le choix de me lancer dans un « tour de Crimée » en stop. Bon choix ! La république autonome de Crimée offre énormément de paysages contrastés réunis sur une « petite » partie du territoire Ukrainien. Pour en faire le tour, de sa capitale Simferopol en passant par sa pointe orientale Kertch, il m’aura fallu 7 jours pendant lesquels je découvrais en premier les troglodytes de Baktchissaraï, enclave Tatare à majorité musulmane perchée dans les montagnes du centre.
La surpeuplée côte sud de Sebastopol à Yalta, ultra-touristique et hors de mes moyens.
L’oubliée pointe Est de la Péninsule de Taman, à une encablure de la Russie.
Pour finir ce tour je me rendais jusqu’aux terres brûlées du Cap Kazantip, un parc national dont j’étais à ce moment l’unique visiteur, errant dans des paysages de Far West et m’arrêtant dans des criques abandonnées de la Mer d’Azov pour me baigner dans ses eaux turquoises. Comme quoi, non, on ne se gèle pas toujours les couilles en Ukraine monsieur Coluche 🙂
Au final je parvenais à Kharkiv, dernière ville avant la Russie. C’est ici malheureusement que j’apprenais la disparition brutale de mon ami le plus proche, un coup terrible qui restera gravé dans ma chair et dans mon coeur pour tout ce long chemin. Je ne savais pas s’il était opportun d’en parler sur le blog, mais puisque j’ai décidé de poursuivre ce voyage en sa mémoire, j’ai aussi décidé de lui rendre hommage ici aussi.
Je conclus donc cet article sur une note très triste, mais elle est au plus près de mon état d’esprit au moment où j’écris ces quelques lignes et je sais que ça lui aurait fait plaisir.
La route, comme la vie, doit se poursuivre… et c’est en Russie que cela va se passer… A bientôt !
En te lisant j’ai qu’une hate… Partir l’année prochaine 🙂
Ravi que ça te motives 😉
Plutôt qu’un message d’encouragement, j’ai envie de te faire sourire avec les dialogues d’Audiard issus des Barbouzes. Ne sachant pas si tu peux avoir une connexion rapide pour lire la vidéo je te mets les dialogues en plus
Boris Vassilieff
– Oooh, petite soeur, mon coeur saigne, Boris est complètement détruit, abimé de sanglots, aaahhh…
(musique de violons tziganes)
Francis Lagneau
– Ah, le con…
Boris Vassilieff
– Pitié, laisse-moi te regarder, tu es splendidement occidentale… Boris, lui, hurle de douleur, toi tu souffres en-dedans…Ah !
Rosalinde
– Je crois Monsieur que la douleur vous égare…C’est Madame qui souffre en-dedans…
Boris Vassilieff
– Ahhh…Le désespoir, la foliiiie…Anouchka petite soeur dans mes bras…J’ai couru, épouvanté, Transsibérien, Tupolev, je pousse dans l’avion des cris terribles…aooouuhh… !
Amaranthe
– Mais enfin Monsieur, qui êtes-vous ?
Boris Vassilieff
– Tu…Mais…Boris ! Voyons ! Le presque frère…Ce pauvre cher Constantin a têté le lait de ma mère à Odessa…Ah…Odessa…Je nous vois encore, nos jeux, nos chants…Laï-laï-laï ! Wouh ! Laï-laï-laï-laï-la-la-la-laï !Wouh ! Aaah…L’odeur du goudron sur les quais d’Odessa, le vent du large dans les cheveux de ce pauvre cher Constantin…
Amaranthe
– Mais je croyais qu’il était né à Téhéran ?
Boris Vassilieff
– Et alors, hum ? On chante aussi bien à Téhéran qu’à Odessa, non ?
Francis Lagneau
– Oui mais le vent du large souflle un peu moins fort, c’est à deux cents bornes de la mer.
Boris Vassilieff
– Hum ! Notion bourgeoise des distances !
Hahaha merci Laurent ! Du coup je me suis refait le film ^^
Courage Manu, ce genre de nouvelles quand on est loin est difficile, j’en sais quelque chose, mais tu lui fais un bel hommage. Bonne continuation de ta route!